Les députés de la majorité présidentielle font le point

 

Selon le dernier rapport d’Europol sur la situation et les tendances du terrorisme en Europe, le terrorisme d’extrême droite fait référence à l’utilisation de la violence terroriste par les extrémistes de droites qui utilisent, incitent, menacent, légitiment ou soutiennent la violence et la haine pour atteindre leur objectif politique et idéologique.

Les idéologies violentes d’extrême droite sont axées sur le nationalisme d’exclusion, le racisme, la xénophobie et/ou l’intolérance qui y est associée. Le néonazisme et le néofascisme en sont des exemples.

L’un des concepts fondamentaux de l’extrémisme de droite est le suprémacisme ou l’idée qu’un groupe de personnes partageant un élément commun (nation, race, culture, etc.) est supérieur à tous les autres peuples. 

 

Qui sont-ils ?

La scène de l’extrême droite était historiquement dominée par des groupes néo-nazis hiérarchisés.

Les membres des groupes associés au spectre hiérarchique néo-nazi et à ses sous-cultures sont souvent liés aux scènes de la musique et des arts martiaux mixtes (MMA), à l’hooliganisme et sont généralement connus des services de police ou de renseignement. Traditionnellement, ces groupes attirent des personnes de tous âges appartenant à des factions marginalisées de la société, ayant un faible niveau d’éducation et un statut économique peu élevé.

Les dernières synthèses faites par les services de renseignement français recensent entre 2 000 et 3 000 personnes.

L’implantation géographique des groupuscules radicaux n’a pas varié depuis les années 1930 : Lyon, Marseille, et aussi Nice, une ville déjà très importante pour le Parti populaire français (PPF) de Jacques Doriot.

Le rapport de la commission d’enquête du Sénat sur la menace terroriste indique qu’au 1er février 2018, 611 personnes étaient détenues pour terrorisme ; parmi elles, 505 appartiennent aux réseaux djihadistes et 28 à l’extrême droite activiste

En 2019, une commission d’enquête à l’Assemblée nationale

Pour rappel, en novembre 2018, le Groupe LFI et son Président Jean-Luc Mélenchon avait fait usage de leur droit de tirage afin que soit créée une commission d’enquête sur la lutte contre les groupuscules d’extrême droite en France. Elle faisait déjà écho à l’époque à une proposition de résolution déposée par le groupe Les Républicains afin de créer une commission d’enquête sur les groupuscules d’extrême gauche. La Commission d’enquête présidée par Muriel RESSIGUIER (LFI) et rapportée par Adrien MORENAS (LREM) avait rendu ses conclusions le 6 juin 2019.  

Comme le soulignait leur rapport, « l’État n’effectue aucun suivi des infractions en fonction des motivations idéologiques de leurs auteurs. Les statistiques politiques, tout comme les statistiques ethniques, sont proscrites ».

Que dit la loi

Cette interdiction des statistiques figure en effet à l’article 226-19 du code pénal, qui interdit la collecte de données à caractère personnel sans le consentement de l’intéressé lorsque ces données font directement ou indirectement apparaître « les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, ou les appartenances syndicales des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre de celles-ci. »

Le terrorisme : une notion aux contours flous  

La question de la définition du terrorisme fait l’objet de débats très anciens, qui ont encore été relancés à la suite des attentats du 11 septembre 2001, commis par Al-Qaïda, et l’émergence récente de l’Etat islamique. Ces débats dépassent le cadre purement technique, pour présenter également de nombreux aspects politiques et idéologiques.

La Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, adoptée en 1999, contient pour la première fois une disposition qui énonce certains critères de définition du terrorisme. L’infraction visée par la Convention consiste dans la fourniture intentionnelle de fonds en sachant qu’ils seront utilisés en vue de commettre soit l’un des actes couverts par l’une des conventions internationales existantes, soit « tout autre acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque ».

Cette première ébauche d’une définition internationale du terrorisme illustre toute la difficulté qu’il y a à exprimer des critères clairs permettant d’identifier avec précision le phénomène terroriste, de manière à le distinguer d’autres activités, qu’elles soient criminelles ou politiques. En effet, comme de nombreux auteurs l’ont souligné, les contours donnés à la notion dans la Convention de 1999 sont particulièrement flexibles et imprécis.

 

La France considère, quant à elle que « les infractions commises intentionnellement, en relation avec une entreprise individuelle ou collective, ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, constituent des actes de terrorisme » (article 421-1 du code pénal).

État de la menace

La Commission d’enquête identifiait deux risques terroristes en la matière :

  • La première possibilité est celle de groupes aux effectifs très réduits (environ une dizaine de personnes), de type survivaliste. Le passage à l’acte potentiel s’inscrit dans une vision de la société belliciste : ces groupes se considèrent en guerre contre le péril étranger, et comptent riposter. Ils se positionnent notamment en réaction aux attentats islamistes que la France a connus ces dernières années.
  • Le deuxième risque consiste dans la figure de celui qu’on nomme « loup solitaire », sans qu’il le soit véritablement. La capacité d’un individu seul à passer à l’acte réside dans les contacts qu’il a entretenus précédemment avec des groupes. C’est par exemple le cas de Maxime Brunerie qui a fréquenté les milieux d’ultradroite (en particulier le groupuscule Unité radicale) avant de commettre sa tentative d’assassinat contre le président de la République Jacques Chirac le 14 juillet 2002.
  • Plus récemment, un habitant d’Aix-en-Provence, néo-nazi, a été interpellé le 29 mai 2019 : il avait déclaré sur les réseaux sociaux envisager de faire « un carnage » au cours du dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) à Marseille le 3 juin.

Un rapport d’EUROPOL

Dans sa dernière édition parue en 2022, le rapport Europol sur la menace terroriste dans l’Union Européenne indique que la France comptabilise 45% de l’ensemble des arrestations réalisées dans l’Union européenne en lien avec des affaires de terrorisme d’extrême droite, contre 33% il y a trois ans. Dans le détail, 29 personnes étaient arrêtées pour ce motif en 2021, contre 5 et 2020 et 7 en 2019.

Le rapport souligne par ailleurs que le nombre d’attentats terroristes d’extrême droite reste faible. En 2021, les États membres n’ont signalé aucun attentat d’extrême-droite mené à bien, tandis que deux attentats ont été déjoués en Suède et en Autriche, et un attentat a échoué en Belgique. De la même manière, les attentats terroristes de gauche et anarchistes dans l’UE ont fortement diminué en 2021. Seule une attaque a été signalée en Allemagne tandis que les États membres avaient signalé 25 attentats en 2020 et 26 en 2019 signalés par les États membres.

Si le nombre d’arrestation et d’attaques d’extrême droite a tendance à croître tandis que celle d’extrême gauche a tendance à diminuer, la menace terroriste principale demeure la menace djihadiste.

Anticiper et répondre à la menace terroriste

La lutte contre le terrorisme est un enjeu majeur de la stratégie de sécurité nationale et fait l’objet d’une politique gouvernementale forte, qui doit sans cesse s’adapter aux évolutions de la menace.

Le périmètre retenu par le Gouvernement pour y faire face englobe tous les groupes et mouvements qui ne respectent pas les principes démocratiques et qui sont susceptibles de porter atteinte à nos institutions, notamment par des actions violentes. Ce périmètre englobe des idéologies véhiculées à l’extrême droite ou à l’extrême gauche, en particulier celles qui prônent le racisme, l’antisémitisme et celles qui encouragent le recours à la violence.

Depuis 2017, un certain nombre de lois ont été adoptées et visent à prévenir et à mieux lutter contre le terrorisme :

  • La loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme a permis le déploiement de dispositifs conséquents pour prévenir les actes terroristes : les périmètres de protection, la fermeture de lieux de culte, les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, les visites et saisies domiciliaires.
  • Cette loi permet la mise en place de contrôles administratifs et de mesures de surveillance individuelle à l’encontre de toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d’une « particulière gravité » et qui entre en relation habituelle avec des personnes ou organisations aux visées terroristes ou qui soutient ou adhère à des thèses incitant au terrorisme. Cette mesure peut être assortie de l’obligation de se présenter une fois par jour aux services de police ou d’un placement sous surveillance électronique.
  • La loi relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement (2021). Cette loi a un double objectif : prévenir les actes terroristes et améliorer le renseignement. Il a permis d’encadrer de la conservation de renseignements aux fins de recherche et développement, d’expérimenter une technique d’interception des communications émises ou reçues par voie satellitaire, d’autoriser le recueil en temps réel des adresses complètes de ressources sur internet (URL) utilisées par une personne préalablement identifiée susceptible d’être en lien avec une menace…
  • La loi confortant le respect des principes de la République (2021) a quant à elle permis de créer des nouveaux motifs de dissolution des associations : les associations peuvent être sanctionnées pour des agissements commis par leurs membres, agissant en cette qualité, dont elles avaient connaissance.

Afin de prévenir la structuration de mouvements extrémistes et dangereux

Le Ministère de l’Intérieur dissout relativement régulièrement des associations susceptibles de conduire des actions violentes.

En mars 2021, le Gouvernement a ainsi dissout l’association Génération Identitaire car, selon le décret, « en dépit de son objet officiel […] l’association « Génération identitaire » promeut en réalité, au travers de ses interventions, de ses publications ainsi que des agissements et propos de ses dirigeants ou membres, une idéologie incitant à haine, à la violence ou à la discrimination des individus à raison de leur origine, de leur race ou de leur religion ». Ce décret portant dissolution de l’association fait très clairement référence aux liens de cette association avec l’idéologie d’extrême droite : « qu’au nom de cette idéologie désormais clairement assumée, plusieurs membres se réclamant de cette association sont à l’origine d’agissements ou de tentatives d’agissements violents à l’encontre d’étrangers, plus spécifiquement musulmans, ou d’actions ou propos constitutifs d’incitation à la haine ou à la discrimination à raison de leur race, origine ou religion, démontrant ainsi la capacité d’influence néfaste de cette association et son identification en tant que structure dont les acteurs d’ultra-droite se revendiquent ». En outre, « l’association « Génération identitaire » entretient, par le biais de plusieurs de ses membres dirigeants, des liens avec des groupuscules d’ultra-droite dont elle reçoit un soutien logistique et qui défendent également une idéologie appelant à la discrimination, à la violence ou à la haine, au nom de théories racialistes ou suprématistes, ou avec des individus se réclamant également de ces idéologies ce qui démontre la communauté d’idéologie entre ces différents acteurs ».

C’est donc une menace prise très au sérieux par le Gouvernement, les services de police, de gendarmerie et de renseignement. Le nombre d’arrestations en lien avec l’extrême droite traduit d’une part de l’augmentation probable de la radicalité chez ces activistes, mais aussi et surtout de la capacité de nos services de renseignement à identifier et évaluer correctement le risque de trouble à l’ordre public qu’elle peut générer. 

 

« La lutte contre le terrorisme d’extrême droite » est un débat mis à l’ordre du jour dans le cadre de la semaine de contrôle d’avril 2023, qui aura lieu lundi 3 avril 2023 à 15h00, à la demande du groupe Ecolo NUPES.