Présentation de l’étude Transition(s) 2050 – Choisir maintenant, Agir pour le climat par l’ADEME

 

Depuis 2017, je suis membre de la Commission du Développement Durable et de l’Aménagement du Territoire de l’Assemblée nationale.

Le mercredi 2 février 2022, dans l’après-midi, en Commission du Développement Durable et de l’Aménagement du Territoire, nous avons auditionné Arnaud Leroy, président du conseil d’administration, et David Marchal, directeur exécutif adjoint de l’expertise et des programmes de l’Agence de la transition écologique de l’ADEME.

 

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Les objectifs de la réduction des gaz à effet de serre (GES)

En ligne avec ses engagements internationaux de l’accord de Paris (2015), et dans l’objectif collectif de stabiliser le climat sous le seuil des + 2 °C, la France a construit deux premières Stratégies Nationales Bas Carbone (SNBC). Elles ont permis de fixer les grands objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et les budgets carbone qu’elle doit respecter pour les années à venir.

La trajectoire de réduction des émissions et des absorptions des GES doit permettre d’atteindre un objectif de neutralité carbone d’ici 2050, soit un équilibre entre les flux annuels d’émissions et les flux d’absorption (selon la loi Énergie-Climat de 2019).

Des changements dans nos pratiques

Ceci implique, dès les prochaines années, d’indispensables transformations, rapides, profondes et systémiques, pour diminuer considérablement nos impacts néfastes non seulement sur le climat, mais également sur les écosystèmes et lutter contre les pollutions. Ces transformations supposent une mobilisation sans précédent de tous les acteurs de la société, d’importantes innovations techniques, institutionnelles et sociales ainsi qu’une évolution profonde des modes de vie individuels et collectifs, des modes de production et de consommation, de l’aménagement du territoire…

C’est à l’heure où des décisions doivent être prises pour réduire drastiquement les émissions de GES que l’ADEME publie ses travaux en amont des délibérations collectives sur la future Stratégie Française Énergie-Climat (SFEC) et à la veille des débats de l’élection présidentielle de 2022

Quels sont les objectifs ?

En effet, l’objectif de cet exercice de scénarisation est de contribuer à rassembler des éléments de connaissances techniques, économiques et sociales, pour nourrir des débats sur les options possibles et souhaitables. Les décisions collectives doivent en effet porter autant sur la société durable que nous souhaitons construire ensemble que sur les modalités de réalisation de transformations profondes et systémiques qui la rendront possible. C’est pourquoi l’ADEME propose ici quatre scénarios « types » qui présentent de manière volontairement contrastée des options économiques, techniques et de société pour atteindre la neutralité carbone, sans épuiser pour autant la diversité des futurs possibles qui pourront être décidés. Ces 4 scénarios sont désignés par les noms suivants :

  • Génération frugale (S1)
  • Coopérations territoriales (S2)
  • Technologies vertes (S3)
  • Pari réparateur (S4)

Atteindre la neutralité repose sur des paris humains ou technologiques forts dans tous les cas mais qui diffèrent selon les scénarios : régulation de la demande, changement de comportement, déploiement de technologies dans tous les secteurs…

Ces hypothèses de ruptures sont des conditions de réalisation des scénarios. En particulier le scénario « Génération frugale » présente une mutation sociale rapide qui induit un risque fort quant à son acceptation et le scénario « Pari réparateur » comporte un pari risqué sur les technologies de captage et stockage de CO2, BECCS et DACCS, encore peu développées à ce jour. Ces scénarios apparaissent donc comme des scénarios limites dans cet univers des possibles.

Ce qui est en jeu, c’est la survie de l’humanité

Pour tous les scénarios, il y a urgence à agir. Ce qui est en jeu, c’est la survie de l’humanité.  L’ampleur des transformations socio-techniques à mener est telle que ces dernières mettront du temps à produire leurs effets. Il faut entreprendre dès cette décennie la planification et la transformation profonde des modes de consommation, de l’aménagement du territoire, des technologies et des investissements productifs.

À titre d’exemple, tous les scénarios nécessitent une augmentation des capacités de production de biométhane de plus de 3 TWh/an (soit 150 nouveaux méthaniseurs/an environ), ainsi qu’une très forte croissance des capacités électriques des énergies renouvelables, EnR (+ 5,5 à + 8,9 GW/an en moyenne sur la période 2020-2050, selon les scénarios). Cependant, ces efforts mettront du temps. Ainsi, les scénarios « Technologies vertes » et « Pari réparateur », qui s’appuient surtout sur les développements technologiques, présentent des émissions significativement plus élevées en 2030 que les deux premiers scénarios, qui mobilisent davantage le levier de la sobriété et plus largement, de la régulation de la demande.

 

Une modification radicale des usages

La réduction de la demande d’énergie est le facteur clé pour atteindre la neutralité carbone : de – 23% (S4) à – 55% (S1) pour la demande finale en 2050 par rapport à 2015 suivant les scénarios. Cela nécessite cependant une modification radicale des usages et des techniques de l’habitat, des mobilités ainsi qu’une adaptation profonde du système productif agricole et industriel.

La réduction plus (S1) ou moins (S4) forte de la consommation de ressources naturelles, notamment grâce à l’économie circulaire, participe directement à cette baisse de la demande d’énergie. Elle se matérialise par ailleurs par la quantité de déchets collectés qui augmente de S1 à S4. Elle nécessite de transformer les imaginaires et les pratiques de consommation pour engager un cercle vertueux de sobriété.

Une profonde mutation de l’industrie

L’industrie va devoir se transformer non seulement pour s’adapter à une demande en profonde mutation (baisse des volumes produits, exigences de durabilité…) mais également pour décarboner sa production. Cela nécessitera des plans d’investissements de grande ampleur (décarbonation des mix énergétiques, efficacité énergétique et matière, captage et utilisation ou stockage du CO2…), tant pour la massification de technologies matures que pour l’émergence d’innovations de rupture dans les procédés industriels et pour le déploiement des infrastructures nécessaires.

Une compréhension et construction de ces transformations par l’ensemble de la société (citoyens, salariés) sera primordiale pour fédérer autour de cette « nouvelle révolution industrielle bas carbone »

La préservation de la biodiversité

Le vivant est l’un des atouts principaux de cette transition. Outre la valeur propre des éco- systèmes pour la préservation de la biodiversité et les autres fonctions écologiques et d’aménagement du territoire, sa contribution à la décarbonation de la France repose sur trois leviers spécifiques et interdépendants : le potentiel de réduction des GES, le potentiel de stockage naturel de carbone et le potentiel de mobilisation de biomasse renouvelable substituable aux ressources fossiles.

Les scénarios de l’ADEME présentent quatre équilibres possibles et contrastés entre services attendus (alimentation, stockage du carbone, biomasse…), impacts des systèmes de production et aménagement du territoire.

L’adaptation des forêts et de l’agriculture devient donc absolument prioritaire pour lutter contre le changement climatique. Tous les scénarios montrent le rôle primordial de la préservation des puits de carbone et de la capacité à produire de la biomasse en 2050.

Les évènements extrêmes déjà observés (méga-feux, inondations, at- taques de parasites…) illustrent l’impact catastrophique du changement climatique, qui pourrait générer un effondrement de certains milieux naturels vivants et remettre en cause la faisabilité de tous les scénarios. Au-delà de l’intérêt de protéger les écosystèmes pour leur valeur propre, renforcer leur résilience est donc un enjeu absolument prioritaire de la lutte contre le changement climatique, notamment pour préserver les stocks de carbone et les capacités de production de biomasse.

Le souci de l’eau

La pression sur les ressources naturelles est très différente d’un scénario à l’autre. C’est particulièrement le cas pour l’eau d’irrigation ou les matériaux de construction, dont les volumes consommés varient d’un facteur 2 entre le scénario le moins consommateur et le plus consommateur.

Même constat sur les sols artificialisés, en légère baisse par rapport à aujourd’hui pour S1, mais en hausse de + 40 % pour S4. Par ailleurs, le recyclage ne pouvant pas combler le déficit de matière, il est nécessaire d’économiser la matière le plus possible.

Dans tous les scénarios étudiés, l’approvisionnement énergétique repose à plus de 70 % sur les énergies renouvelables en 2050. L’électricité est, dans tous les cas, le vecteur énergétique principal (entre 42 et 56 % suivant les scénarios), mais sa production décarbonée ne peut pas être un prétexte à son gaspillage, afin de limiter la pression sur les ressources. Le mix varie entre les scénarios, en fonction du niveau de consommation mais aussi des choix techniques, qui s’appuient sur un développe- ment plus ou moins dynamique des EnR et/ou sur le nouveau nucléaire (S3 et S4). Le gaz reste indispensable dans tous les scénarios, avec un niveau d’approvisionnement allant de 148 TWh (S1) à 371 TWh (S4) et un potentiel de décarbonation (biogaz, gaz de synthèse) qui peut être très élevé dans S1, S2 et S3 (environ 85 %, contre 51 % pour S4).

 

 

Ce travail de prospective inédit de la part de l’agence entend nourrir la prochaine Stratégie française Energie-Climat.

 

Retrouvez l’ensemble de l’étude !

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