La Sécheresse – L’essentiel

 

2022 est l’année la plus chaude jamais enregistrée en France selon Météo-France. 

Ponctuée d’extrêmes climatiques, 2022 est un symptôme du changement climatique en France. Remarquable dans le climat actuel, elle pourrait devenir « normale » en 2050.

Dans ce contexte, la France métropolitaine connait une sécheresse météorologique préoccupante. L’année 2022 a été marquée par une sécheresse prolongée, et d’une intensité record : avec respectivement 60 % et 85 % de déficit, les mois de mai et juillet sont les plus secs jamais enregistrés à l’échelle de la France depuis le début des mesures en 1959.  

L’année dernière, 93 départements ont été contraints d’adopter des restrictions d’eau et 75 départements ont subi des situations de crise. Les inspections des ministères de la transition écologique, de l’agriculture, de l’intérieur et de la santé (IGEDD, CGAAER, IGA, IGAS) ont été saisies pour réaliser une mission de retour d’expérience de la gestion de la sécheresse en 2022.

Actuellement, les indicateurs restent très inquiétants : température élevée avec une végétation en expansion et sols secs, peu de stock neigeux, réserves pour les axes réalimentés à niveau bas, nappes en retard de recharge… Dans plusieurs départements, des restrictions de niveau « alerte » ou « alerte renforcée » sont en vigueur. Comparativement à la même période l’année dernière, les nappes sont globalement dégradées, avec en moyenne deux mois de retard sur leur niveau de recharge. 

 

Afin d’anticiper un été 2023 qui s’annonce difficile, le Gouvernement a fait plusieurs annonces :

  • Accompagnement des collectivités fragiles en matière d’alimentation en eau potable par les préfectures, afin de mettre en place les mesures de sécurisation qui s’imposent ;
  • Investissement de 100 millions d’euros d’aides supplémentaires en 2023 en faveur de projets de résilience territoriaux (études ou travaux de sécurisation de l’alimentation en eau potable par exemple) par les Agences de l’eau ;
  • Présentation prochaine d’un « Plan eau » visant à mieux gérer et utiliser la ressource en eau tout en renforçant les moyens dans chaque territoire pour lutter contre les pénuries.

Le 27 février, une réunion des préfets coordinateurs des sept grands bassins du pays (Artois-Picardie, Seine Normandie, Rhin-Meuse, Loire-Bretagne, Adour-Garonne, Rhône-Méditerranée et Corse) s’est tenue à l’initiative du Gouvernement afin de planifier les problématiques de raréfaction d’eau. Au-delà d’un état des lieux de la situation actuelle, les préfets ont été invités à prendre dès maintenant des arrêtés de restriction de l’eau si cela s’avère nécessaire. Les préfets de département seront réunis le 6 mars pour un point de suivi.

Niveaux de restrictions

Pour faire face aux périodes d’insuffisance de la ressource en eau, les préfets peuvent prendre des mesures exceptionnelles, graduelles et temporaires de limitation ou de suspension des usages de l’eau non prioritaires pour les particuliers et les professionnels, selon différents niveaux :

  • Alerte : réduction de tous les prélèvements en eau et interdiction des activités impactant les milieux aquatiques ; restrictions en matière d’arrosage, de remplissage et de vidange des piscines, de lavage de véhicules et d’irrigation de cultures ;
  • Alerte renforcée : réduction de tous les prélèvements en eau et interdiction des activités impactant les milieux aquatiques ; restrictions renforcées en matière d’arrosage, de remplissage et de vidange des piscines, de lavage de véhicules et d’irrigation de cultures ;
  • Crise : ce niveau est déclenché pour préserver les usages prioritaires ; interdiction des prélèvements en eau pour l’agriculture (totalement ou partiellement), pour de nombreux usages domestiques et pour les espaces publics.

Avant d’adopter ces mesures de restrictions, les préfets peuvent également placer leur territoire en état de « vigilance », qui consiste à renforcer les mesures d’information et de sensibilisation des particuliers et des professionnels en matière de sobriété des usages de l’eau.

L’élevage au défi du réchauffement climatique

En matière d’adaptation au changement climatique, l’eau est un chantier prioritaire. En 2050, les débits moyens annuels des cours d’eau en métropole diminueront de 10 à 40 % et les épisodes extrêmes seront nettement plus fréquents et plus intenses.

L’eau consommée, c’est-à-dire celle qui n’est pas restituée aux milieux aquatiques après utilisation, représente 5,3 milliards de m3 chaque année, soit environ 16 % de l’eau prélevée. Cela représente 82 m3 par habitant.

L’agriculture est la première consommatrice, avec 45 % du total, devant le refroidissement des centrales électriques (31 %), la production d’eau potable (21 %) et les usages industriels (4 %). Cette part monte à 80 % sur la période de juin à août.

L’eau à usage agricole sert principalement à alimenter le bétail et irriguer les cultures, dont une part importante est destinée à l’élevage. Les cultures irriguées sont d’abord le maïs (41 % de la surface irriguée), devant le blé ou le sorgho (17 %).

Dans ce contexte, l’élevage est particulièrement exposé …

…d e par l’impact des fortes chaleurs sur les troupeaux et son importante dépendance à la ressource en eau. A titre d’exemple, les vaches boivent plus de 100 litres d’eau par jour, parfois 150 litres l’été, et selon Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, « une vache laitière peut perdre jusqu’à 20 % de sa production quand les 35 °C sont dépassés ».

L’intensité en eau de l’élevage s’ajoute aux inconvénients liés à sa forte contribution aux émissions de gaz à effet de serre (méthane) et d’azote (ammoniac, nitrates) ou pour sa faible efficience protéique (la production de 1 kg de protéines de viande bovine française demande en moyenne 12,5 kg de protéines végétales, il en résulte un fort prélèvement de ressources, un besoin accru d’eau et de surface : 71 % des terres agricoles européennes servent à nourrir le bétail).

En France, les céréales représentent 71 % des surfaces agricoles irriguées. Le maïs, utilisé surtout pour nourrir les animaux, en occupe la moitié, tandis que l’arrosage des prairies a triplé depuis dix ans. L’alimentation des vaches laitières comprend de l’herbe (36 % en moyenne), mais aussi du maïs fourrager (42 %), des céréales et des oléoprotéagineux, dont le soja, ainsi que divers compléments alimentaires (22 %). Or, ces végétaux ont besoin d’importantes quantités d’« eau bleue » issue de prélèvements dans les nappes phréatiques, les rivières, les fleuves et les retenues d’eau. Là où la production d’1 kg de haricots nécessite en moyenne 38 litres d’eau bleue, il faut en prélever 315 pour produire 1 kg de bœuf et 406 pour 1 kg de porc.