En amont de l’annonce des plans de relances, les appels pour une plus grande prise en compte de la transition écologique et solidaire se sont multipliés au cours des dernières semaines. En voici quelques exemples :

  • La contribution de la Convention citoyenne pour le climat (9 avril) : alors que la remisede ses travaux a été repoussée par la crise sanitaire, ses membres ont souhaité exprimer des pistes de réflexions en amont des annonces sur la relance après covid-19. Dans ce document, ils indiquent vouloir contribuer aux arbitrages « car la crise que nous traversons n’est apparemment pas sans lien avec le dérèglement climatique et la dégradation de l’environnement » et plaident que la relance ne soit pas réalisée au détriment du climat, de l’humain et de la biodiversité en ne reproduisant pas les écueils de la crise de 2008. Ils proposent ainsi que les financements mobilisés soient socialement acceptables, fléchés vers des solutions vertes et qu’ils se concentrent dans des secteurs d’avenir respectueux du climat mais également une reconfiguration des relations internationales avec une régulation en faveur du climat et une relocation des activités des secteurs stratégiques pour assurer la sécurité alimentaire, sanitaire et énergétique de la France.
  • La tribune de 13 ministres de l’UE pour faire du Green Deal le point central de la relance (10 avril) : 13 ministres de l’Environnement de l’Union européenne (dont la France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne) ont signé une tribune appelant à ne pas oublier la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la biodiversité dans l’urgence de la reprise économique. Le texte appelle à résister à « la tentation de solutions à court terme en réponse à la crise actuelle qui risquent d’enfermer l’Union européenne dans une économie basée sur les énergies fossiles pour des décennies » et proposent de réfléchir à l’après-crise au niveau européen. Ils proposent ainsi à la Commission d’utiliser le Green Deal comme une nouvelle stratégie de croissance pour l’UE, permettant à la fois de stimuler l’économie, de créer des emplois tout en accélérant considérablement la transition écologique et d’accroître les investissements dans les domaines de la mobilité durable, de la rénovation des bâtiments, des énergies renouvelables, de la recherche etde l’innovation, de la biodiversité ou encore de l’économie circulaire.
  • L’alliance pour une relance verte  (14 avril) : à l’initiative de l’eurodéputé et président de la commission ENVI, Pascal CANFIN, 180 ministres, députés européens, dirigeants de grandesentreprises, ONG et syndicats ont lancé une « alliance européenne pour une relance verte ». Ils appellent ainsi à soutenir et à mettre en œuvre la mise en place de paquets d’investissements pour la relance verte et la biodiversité, qui serviront d’accélérateurs de la transition vers la neutralité climatique et des écosystèmes sains.
  • La tribune de 90 dirigeants d’entreprises pour faire de la relance économique un accélérateur de la transition écologique (3 mai) : à l’initiative d’Entreprises pourl’Environnement, plus de 90 dirigeants d’entreprises françaises et internationales (dont LVMH, Nokia, Air France, Véolia, SNCF, Medef, etc) ont lancé une mobilisation pour faire de la relance économique un accélérateur de la transition écologique. Dans une tribune publiée sur le site du Monde, ils annoncent vouloir garder les ambitions collectives en matière de transition écologique » tout souhaitant qu’une « large part des moyens financiers qui seront prochainement mobilisés pour la relance économique aurait tout intérêt à l’être dans les directions qui avaient été précédemment identifiées pour accompagner la transition écologique, avec un souci encore plus affirmé de la justice sociale ». Parmiles trajectoires évoquées, la rénovation énergétique des logements et bâtiments, tertiaires publics et privés, le développement des mobilités décarbonées, des véhicules électriques, des infrastructures de mobilités douces et des transports en commun ou encore l’expansion et le stockage des énergies renouvelables etdécarbonées, électriques ou chaleur » sont une priorité. A noter que Greenpeace et d’autres ONG se sont indignés de cette tribune, dénonçant le « greenwashing » de ces grandes entreprises, demandant dans le même temps un report de certaines mesures environnementales auGouvernement à travers la voie du Medef.
  • La réflexion commune de 8 autorités de régulation française (6 mai) : l’Autorité de la concurrence, l’Autorité des marchés financiers (AMF), l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep), l’Autorité de régulation des transports (ART), la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), la Commission de régulation de l’énergie (CRE), le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) ont publié un communiqué commun s’engageant à faire de l’urgence climatique une priorité commune de larelance ; elles plaident dans un pour une meilleure prise en compte de cette urgence dans ladéfinition de leurs missions6.

    En parallèle, plusieurs consultations citoyennes ont été mises en place par des ONG, syndicats ou acteurs de la société civile afin de réfléchir à la relance verte, c’est notamment le cas des plateformes « Plus Jamais ça » initiée par la CG T , FSE et plusieurs associationsenvironnementales telles que Greenpeace ou Attac ; « Le Jour d’Après » initiée par une soixantainede parlementaires ; ou encore « Inventons le monde d’après » lancée par La Croix-Rouge, WWF et Make. org.

    ▪ Le soutien aux entreprises stratégiques et les engagements environnementaux

    Dans le cadre du projet de loi finances rectificatif 2, le Gouvernement a prévu un soutien de 20 Mds€ destiné à recapitaliser certaines entreprises stratégiques en difficulté en raison dela crise sanitaire. Un amendement du groupe LaREM a permis de prévoir que les entreprisesconcernées par le soutien de l’État intègrent « les objectifs de responsabilité sociale, sociétale et environnementale dans leur stratégie, notamment en matière de lutte contre le changement climatique ». Un rapport sera rendu au parlement afin de détailler l’utilisation de ces ressources publiques et la mise en œuvre de ces objectifs.

    Du fait de son rôle stratégique, l’État a annoncé un plan de soutien à la compagnie d’un montant de 7 Mds€ : 4 Mds€ de prêts bancaires garantis à hauteur de 90% par l’État et 3 Mds€ de prêts directs de l’État. Lundi 4 mai, la Commission Européenne a validé cette aide, estimant que sans ce soutienla compagnie serait exposée au risque de faillite.

    Dans le cadre de leur audition à l’Assemblée nationale le 30 avril 2020, Bruno LE MAIRE et Élisabeth BORNE ont précisé que ces aides seraient conditionnées à la conclusion d’un contrat deperformance et de transition écologique. Cette proposition rejoint celle formulée par le députée européen Pascal CANFIN qui avait demandé, le 17 avril dernier qu’un contrat de transition écologique soit signé entre le Gouvernement et les grandes entreprises auxquelles il viendrait en aidefinancièrement.

    Alors que l’État devrait également apporter un soutien financier à l’entreprise Renault dans les jours àvenir, le Réseau Action Climat demande la mise en œuvre de mesures structurantes pour le secteur :

    o Un plan industriel de sortie des véhicules diesel et essence compatible avec les objectifs climatiques, assorti d’engagements fermes des constructeurs en matière d’investissements dans des véhicules plus sobres et des nouveaux services de mobilité.

    o Une réforme de la fiscalité permettant de réorienter la production automobile vers des véhicules plus sobres et moins émetteurs.

    ▪ Organisations syndicales et relance européenne

    Six organisations syndicats françaises et allemande (CFDT, CGT, FO, CFTC, Unsa et DGB) ont signédans le Monde, une tribune pour saluer l’initiative franco-allemande qui doit se concrétiser « parla modernisation des modèles économiques européens, en plaçant la transition écologique au cœur de la nouvelle stratégie de croissance de l’UE ».

    Elles considèrent que le plan de 500Mds€, annoncé par la France et l’Allemagne en début de semainedoit aller au-delà et être accompagné d’un nouveau cadre financier pluriannuel (CFP) ambitieux, porté à au moins 2% du PIB européen couplé avec un instrument d’emprunt commun garanti par l’Union européenne pour augmenter considérablement les ressources propres. Elles plaident pour que le plan de relance de la Commission européenne s’appuyer sur l’initiative franco-allemande et ne doit rien délaisser des ambitions affichées avec le Green Deal « pour une transitionécologique socialiste juste et un modèle économique plus juste, plus durable et qui remette l’humain au centre. »

    Elles rappellent également que «la santé des concitoyens et des travailleurs demeure une priorité absolue» et disent regretter le manque de concertation entre les États de l’UE qui a pu mener à la prise de décisions non coordonnées, voire au détriment les uns des autres.