Les députés Horizons et de la majorité présidentielle agissent
L’Essentiel
Cette proposition de loi, adoptée à l’unanimité par le Sénat en octobre 2022, a pour objet la création d’une aide d’urgence financière aux victimes de violences conjugales, via un prêt accordé en trois mensualités, par les Caisses d’Allocations familiales (Article 1). Elle prévoit également que l’officier ou l’agent de police judiciaire recevant une plainte informe la victime de la possibilité de bénéficier de l’avance prévue à cette loi et enregistre sa demande le cas échéant (article 2). Elle prévoit la remise d’un rapport par le Gouvernement sur l’intérêt d’un versement d’une aide similaire par la MSA (article 2bis). Enfin, elle gage cette proposition (article 3).
Panorama des mesures
Bilan 1ère lecture – Assemblée nationale
Commission
16 amendements ont été discuté et 4 ont été adoptés, dont une modification du titre de la proposition de loi, désormais « Proposition de loi créant une aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales et intrafamiliales ».
Consensuellement à travers les groupes, il a été convenu d’un travail sur une réécriture commune en vue de la séance lors que la semaine de l’Assemblée nationale en janvier, qui puisse être transpartisane.
Séance publique
En vue de la séance publique, le Gouvernement dépose un amendement de réécriture de l’article 1, déposé également par l’ensemble des groupes de la majorité, dont Horizons.
Objectifs de cette proposition de loi
- Aider les personnes en situation précaire ou sans revenus à quitter le domicile conjugal quand elles sont victimes ;
- Endiguer le nombre de victimes de violences.
Contexte et droit existant
Une étude issue des données des appels passés au numéro vert 3919 dédié aux violences, montre qu’en 2022, 59% des victimes souhaitent quitter le domicile conjugal et 18% indiquent avoir déjà effectué plusieurs départs. Cette proposition de loi traite de la question de la mise à l’abri et de l’indépendance financière des victimes, qui est l’une des raisons pour lesquelles les victimes peuvent avoir du mal à quitter le domicile par manque de ressources propres ou de comportement de « violence économique » (confiscation, chantage financier…).
Cette proposition de loi trouve son origine dans un dispositif expérimental mis en place à Valenciennes, restreinte aux bénéficiaires du RSA avec la CAF du Nord. Cette expérimentation met en place un accompagnement global coordonné par les services sociaux du département et complété par un versement sous deux ou trois jours avec une avance monétaire, équivalent au RSA.
Droit existant
Le terme de violences conjugales rend compte d’infractions commises sur une personne par son conjoint ou ancien conjoint, PACS ou concubin, y compris hors cohabitation.
Le principe premier en droit pénal et civil, est l’éviction de l’auteur des violences du domicile conjugal. Les lois des 28 décembre 2019 et 30 juillet 2020 ont renforcé ce principe dans le cas de victimes bénéficiant d’une ordonnance de protection délivrée par le juge des affaires familiales.
Chiffres clés
En 2020, la proportion des femmes victimes de violences conjugales connues des services de polices et de gendarmerie s’élevait à 5% dans l’Hexagone et 7% dans les Outre-Mer. Le nombre de victimes de violences annuel est estimé par le Ministère de l’Intérieur à 295 000.
- Le nombre de victimes est en augmentation : 145 homicides au sein du couple en 2021, soit +14% par rapport à 2020 – dont 122 femmes.
- Le nombre de plaintes est en augmentation : +10% en 2020, atteignant 159 400.
Impacts
- Impact social
Le premier impact à considérer est l’impact sur le nombre de victimes de violences et les dommages sur les familles.
La proposition de loi aurait pour impact d’inscrire cette avance au rang des prestations légales de la branche famille et donc ne serait plus limitative.
- Impact financier
Lors des auditions au Sénat, la question du coût de cette proposition a été abordée. Il est impossible de chiffrer cette proposition, par méconnaissance du public éligible. A noter toutefois qu’elle devrait représenter principalement des dépenses de trésorerie sur le court terme, assorti de frais de recouvrement. Sur le long terme, un coût devrait être constaté en raison de remises de créances consenties et de non remboursement.
Pour en savoir plus
Analyse des articles
ARTICLE 1er Avance d’urgence en faveur des victimes de violences conjugales
État du droit
La loi du 28 décembre 2019 prévoit d’une part des expérimentations pour améliorer l’accès au logement des femmes victimes de violences conjugales quittant le domicile commun (sous-location de logement social à titre temporaire ou accompagnement financier pour trouver un logement pour les victimes).
D’autre part, elle complète le régime de l’ordonnance de protection délivrée par le juge des affaires familiales, à la demande de la victime vraisemblable de violences conjugales, introduit en 2010, qui doit désormais être rendue dans un délai de 6 jours et élargit les pouvoirs du juge, notamment en affirmant le principe d’attribution du logement à celui qui n’est pas l’auteur des infractions.
La loi du 30 juillet 2020 a assoupli le régime du secret médical, les médecins pouvant alerter le procureur de la République si son patient court un danger immédiat ou se trouve sous emprise et prévoit des poursuites pénales en cas de vol d’un moyen de télécommunication, document d’identité ou moyen de paiement.
Par un arrêté du 3 octobre 2001, les CAF disposent de la capacité de consentir à leur discrétion à des aides financières individuelles sous la forme de prêts d’honneur, selon des conditions de délivrance variées. Ces aides sont octroyées sous formes de prêts pour des allocataires CAF et sous condition de ressources, financées par le fonds national d’action sociale (Fnas) sous forme d’enveloppes limitatives.
L’article 1 prévoit la création d’une aide financière d’urgence aux victimes de violences conjugales dans le code de l’action sociale et des familles, :
- Prêt à taux zéro accordé par les CNAF non soumis à conditions de ressources ;
- Déclenchement dans un délai de 3 jours ouvrés ;
- Versé en 3 mensualités ;
- Accompagnement social et professionnel adapté à la situation pendant 6 mois.
- Le refus opposé à une demande soit être motivé et notifié avant l’expiration du délai de deux jours ouvrés ;
- Les victimes bénéficiaires peuvent élire domicile au sein d’un centre communal ou intercommunal d’action sociale ou organisme agréé ;
- Les allocataires de l’avance bénéficient des mêmes droits accessoires à la prestation du RSA (Complémentaire santé solidaire, prime de Noël, tarifs réduits dans les transports etc.) ;
- L’avance ne peut être considérée comme ressource au sens de l’action sociale.
L’article définit les conditions d’octroi (par adoption des propositions de la Commission des affaires sociales du Sénat), par les victimes de violences attestées par :
- La délivrance d’une ordonnance de protection par le juge des affaires familiales
- Un dépôt de plainte pour des faits de violences
- Ou un signalement adressé au procureur de la République.
L’article définit le mécanisme de remboursement de l’avance :
- Une ou plusieurs échéances ou récupérée par retenues sur les prestations sociales ;
- Les CAF peuvent décider de remises ou réductions de créances en cas de situation de précarité.
Enfin l’article prévoit un dispositif de subrogation des Caf dans les droits des victimes à se constituer partie civile pour demander, en leur nom, la réparation du préjudice subi. Il prévoit que si des condamnations au titre des dommages et intérêts sont prononcés à l’encontre du conjoint, la Caf pourra en récupérer une partie pour la somme avancée à la victime.
Bilan 1ère lecture – Assemblée nationale
Commission
L’article a été adopté, modifié par un amendement du groupe EELV, supprimant la mention du caractère répétitif d’une demande comme étant un motif de refus de l’aide d’urgence, pour ne retenir que le caractère frauduleux.
ARTICLE 2 – Possibilité de demander l’avance d’urgence lors d’un dépôt de plainte
État du droit
- Loi du 28 décembre 2019 : en cas de dépôt de plainte, l’officier ou l’agent de police recevant la plainte doit « informer la victime, oralement et par remise d’un document », qu’elle peut demander ou consentir à bénéficier du dispositif électronique mobile antirapprochement »
- Circulaire du 8 mai 2019 et 23 septembre : dépôt de plainte simplifié et généralisation à l’hôpital.
- Circulaire du 25 novembre 2021 : encourage notamment le dépôt de plainte in situ, au sein dans l’établissement, dans certaines situations dont la crainte de la victime à retourner au domicile conjugal.
Les intervenants sociaux en commissariat ou unité de gendarmerie ont été créés après expérimentation, par une circulaire de 2006, prévoyant leur cadre d’intervention et leurs missions, puis reconnus par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.
Leur rôle est d’évaluer la nature des besoins sociaux révélés dans le cadre de l’activité policière, réaliser l’intervention de proximité et faciliter l’accès aux services sociaux. Ces postes sont co-financés par l’État, les collectivités et les acteurs associatifs notamment. Ils sont fin 2021 plus de 400 et doivent atteindre 600 pour 2025.
L’article 2 prévoit par l’introduction d’un article dans le code de procédure pénale que l’officier ou l’agent de police judiciaire recevant une plainte pour violence conjugales doit informer la victime de la possibilité de recevoir l’avance d’urgence ainsi qu’enregistrer la demande et la transmettre à la Caf compétente ainsi qu’au Conseil départemental. Cette tâche incombera, s’il est présent, à un intervenant social en commissariat ou unité de gendarmerie.
Bilan 1ère lecture – Assemblée nationale
Commission
L’article a été adopté, modifié par un amendement du groupe socialiste, visant à ce que le dispositif soit proposé dès lors qu’une victime porte plainte pour violences conjugales, et non pas uniquement lorsque la plainte concerne une infraction punie d’au moins trois ans d’emprisonnement.
ARTICLE 2 bis A (nouveau)
Bilan 1ère lecture – Assemblée nationale
Commission
Article introduit par un amendement du groupe Écologiste, vise à modifier l’article 88 du code de procédure pénale afin de dispenser les femmes victimes de violences de la procédure de consignation lorsqu’elles souhaitent se porter partie civile et levant ainsi un frein financier à la Constitution de partie civile.
ARTICLE 2 bis Demande de rapport
Cet article demande un rapport au Gouvernement sur l’intérêt de permettre aux MSA de procéder, aux côtés des CAF, au versement de l’avance d’urgence prévue à la présente loi.
Bilan 1ère lecture – Assemblée nationale
Commission
L’article 2bis est adopté, sans modification.
ARTICLE 3
Gage de la proposition de loi
Cet article gage la proposition de loi sur un augmentation de la fiscalité des produits du tabac.
Bilan 1ère lecture – Assemblée nationale
Commission
L’article 3 est adopté, sans modification.