S’attaquer à un élu, c’est s’attaquer à la République toute entière.

En 1ère lecture à l’Assemblée nationale début février 2024

 

Les élus, de tous bords et partout sur notre territoire sont aujourd’hui de plus en plus victimes d’agressions d’une violence inouïe : rien que depuis le 1er janvier 2023, ce sont 1 387 faits qui ont été recensés à l’encontre des seuls élus locaux. Dans près de trois quarts des cas, ce sont les maires qui sont visés.

Les élus sont, rappelons-le, avant tout des femmes et des hommes qui, souvent, sacrifient une partie de leur vie personnelle au service du collectif, au service de l’intérêt général, au service de leurs concitoyens. Ces élus, et leur famille, victimes de harcèlement ou d’agression, méritent d’être soutenus, mieux protégés, mieux accompagnés et que les responsables des violences soient plus lourdement sanctionnés.

Cette violence envers les élus et le sentiment diffus d’insuffisance de protection alimentent la crise de l’engagement citoyen et l’érosion des vocations électorales en particulier au niveau local. C’est intolérable et il faut agir vite.

Le Gouvernement et les parlementaires et le Groupe Horizons & apparentés en particulier, sont pleinement engagés pour assurer la sécurité des élus, qui sont des piliers de notre démocratie, au plus près des besoins de nos concitoyens et des réalités du terrain. La réponse doit être concrète, efficace et surtout complète.

Ainsi, depuis 2017 de nombreuses mesures ont vu le jour et en octobre 2023, à la suite de l’agression du maire de l’Haÿ-les-Roses, Vincent Jeanbrun, la Première Ministre et son Gouvernement ont annoncé, en octobre 2023, un plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus visant à déployer de nouvelles mesures pour garantir aux élus, premiers défenseurs de la République, des conditions d’exercice saines.

Le Groupe Horizons & apparentés votera, avec conviction et force cette proposition de loi, indispensable pierre à l’édifice de la protection des piliers de notre démocratie : les élus.

 

La loi en quelques lignes

Une série de mesures ne nécessitent pas d’évolutions législatives et ont ainsi pu être rapidement mises en œuvre : la mise en place d’un dispositif d’appui psychologique, la mise en place de mesures de sécurisation ponctuelles des élus locaux, le renforcement de la vidéosurveillance aux abords des sites menacés, un renforcement de la communication des élus et la justice avec l’élaboration d’un protocole entre les associations de maires et le Procureur de la République, la mise en place de formations croisées…

Imaginées par les députés, sénateurs et le Gouvernement, d’autres réponses efficaces et concrètes nécessitent une modification de notre législation. C’est l’objet de cette proposition de loi que le Groupe Horizons & apparentés soutient pleinement :

  • D’abord, par le renforcement des peines encourues en cas de violences commises contre les élus. En effet, nous sommes absolument convaincus que les violences envers les élus doivent être sanctionnées de la même manière que celles commises contre les policiers, les gendarmes, les militaires… Ils sont eux aussi, des piliers de la République.
  • Ensuite, lorsqu’un élu est victime de violences, d’injures ou de harcèlement, sa défense et sa prise en charge médicale et psychologique doivent être assurées par la collectivité. L’État, la collectivité et à travers eux, l’ensemble des citoyens doivent être au rendez-vous. Pour cela, il semble indispensable de rendre automatique l’octroi de la protection fonctionnelle des élus, d’imposer la prise en charge par l’État des coûts de couverture assurantielle pour la protection fonctionnelle pour les communes de moins de 10 000 habitants et d’améliorer la prise en charge pour les élus victimes de l’ensemble des restes à charge et dépassements d’honoraires.
  • Il faut, en outre, mieux accompagner les candidats aux élections et les élus pour atténuer la crise des vocations. C’est la raison pour laquelle nous soutenons cette proposition de loi qui vise à appliquer également cette protection fonctionnelle aux candidats : à l’heure où nous sommes face à une crise des vocations, la question de la prise en charge financière des mesures essentielles à la sécurité des personnes ne saurait constituer un obstacle. Nous sommes également pleinement conscients de la difficulté pour beaucoup d’élus d’accéder aux assurances pour les locaux politiques et permanences parlementaires. En imposant aux assurances, en dernier recours, une obligation de prise en charge, l’ancrage local des élus sera facilité.
  • Enfin, il est nécessaire de renforcer la prise en compte des réalités des mandats électifs par les acteurs judiciaires et étatiques. Renouer la confiance et fluidifier les rapports se fait évidemment sur le temps long mais, comme nous l’avions porté lors de notre niche parlementaire au sein de la proposition de loi rapportée par Naïma MOUTCHOU, il faut améliorer l’information des maires par les parquets quant aux suites données à leurs plaintes et signalements afin de faciliter leur compréhension des décisions judiciaires et renforcer la présence des préfets et des procureurs au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance. Nous soutenons donc pleinement ces dispositions.

Entrons dans le détail

La présente proposition de loi, déposée par François-Noël BUFFET et la majorité sénatoriale, vise à renforcer l’arsenal législatif pour mieux protéger et accompagner les élus locaux face à la recrudescence des violences auxquelles ils font face. Elle fait notamment suite à l’incendie volontaire et criminel du véhicule et du domicile du maire de Saint-Brévin-les-Pins, Yannick Morez, et à sa décision de démissionner de son mandat.

Ainsi, cette proposition de loi prévoit :

  • Un renforcement des peines encourues en cas de violences commises contre les élus (articles 1 et 2)
  • Une amélioration de la protection fonctionnelle des élus et des candidats et de leur accès aux assurances (articles 3 à 10)
  • Un renforcement des liens entre l’institution judiciaire et les élus locaux (articles 11 à 14).

La sécurité des élus : une situation qui se dégrade

Ces dernières années, les violences dont sont victimes les élus locaux ont considérablement augmenté. En effet, les atteintes envers les élus locaux connaissent une croissance régulière depuis deux ans. Depuis le 1er janvier 2023, 1 387 faits ont été recensés à l’encontre des seuls élus locaux. Dans près de trois quarts des cas, ce sont les maires qui sont visés. Plus de 12 % de ces faits constituent des violences physiques, tandis que les atteintes par paroles et écrits (menaces, menaces de mort, outrages et injures, diffamation, usurpation d’identité) en représentent 76 %.

891 faits visant des élus ont été recensés par les services de police et de gendarmerie et 632 procédures initiées. Le plus fréquemment, les élus sont victimes d’outrages (36 %) et de menaces de mort (21 %). Les faits de violences physiques (160 en 2020) restent largement minoritaires et stables par rapport à 2022 (165). 42 % des procédures concernent les maires et 20 % les députés. En zone de gendarmerie nationale, ce sont les maires, adjoints et conseillers municipaux qui sont principalement visés, à 85 %. Les parlementaires représentent 12 % des victimes. En zone de police nationale, ce sont les députés qui sont le plus visés : ils représentent 50 % des atteintes aux élus, devant les maires (25 %). Ces statistiques ne rendent compte que des affaires signalées aux services de police et de gendarmerie.

Plusieurs faits graves ont mis en lumière l’urgence de la situation : le décès dans l’exercice de ses fonctions du maire de Signes, Jean-Mathieu Michel, l’incendie volontaire et criminel de son véhicule et de son domicile dont a été victime Yannick Morez, maire de Saint-Brevin-les-Pins, ou encore de l’attaque à la voiture bélier dirigée contre le domicile du maire de l’Haÿ-les-Roses, Vincent Jeanbrun.

Cette violence envers les élus et le sentiment diffus d’insuffisance de protection alimente la crise de l’engagement citoyen et l’érosion des vocations électorales en particulier au niveau local. Auditionné en mai 2023 par la commission des lois du Sénat, Yannick Morez, maire démissionnaire de Saint-Brevin- les-Pins, alertait sur les risques de désengagement des élus en cas de défaut de protection effective des maires dans le cadre de leur mandat.

L’engagement du Gouvernement et des parlementaires dans la protection des élus

Le Gouvernement a pleinement pris la mesure de l’urgence et ce, depuis 2017 :

  • La loi « Engagement et proximité » de 2019 renforçait le dispositif de protection fonctionnelle ;
  • Plusieurs instructions du Garde des Sceaux appelait les parquets à une politique pénale ferme face aux violences aux élus (6 circulaires depuis 2019) ;
  • Mobilisation accrue des forces de police et de gendarmerie nationales sur le terrain au côté des élus.

En outre, en avril 2023, le Ministère de l’Intérieur installait le Centre d’analyse et de lutte des atteintes aux élus (CALAE).

Composé de différents services du ministère de l’Intérieur et des Outre- mer et du ministère de la Justice, il a pour mission de compiler les données qui remontent des préfets et des forces de sécurité intérieure, les analyser et les restituer au sein d’un rapport annuel, et de déployer le « pack sécurité ». Celui-ci va permettre :

  • La création d’un réseau de plus de 3 400 référents « atteintes aux élus » dans toutes les brigades de gendarmerie et les commissariats, afin que les élus aient un point de contact privilégié pour oser parler des menaces ou des violences dont il fait l’objet, que leur situation soit connue et que l’Etat puisse agir ;
  • Le renforcement du dispositif « Alarme élu » qui permet aux élus qui se sentent menacés de se manifester auprès de leur commissariat ou de leur gendarmerie pour être secourus rapidement en cas d’appel au 17 et bénéficier d’une vigilance renforcée de la part des forces de l’ordre ;
  • Le rappel aux préfets du principe « Une menace = une évaluation », pour que les forces de sécurité intérieure évaluent finement la menace et que les préfets puissent décider de mesures éventuelles de protection ;
  • L’amplification de la démarche « d’aller-vers » des forces de l’ordre pour permettre aux élus locaux de déposer une plainte quand ils le souhaitent et où ils le souhaitent ;
  • Le développement de nouvelles sessions de sensibilisation à la gestion des incivilités et désescalade de la violence, dispensées par le GIGN et le Raid, à l’attention des élus ;
  • La mobilisation de la plate-forme PHAROS pour mieux détecter et judiciariser les violences.

La suite de l’agression du maire de l’Haÿ-les-Roses, Vincent Jeanbrun

La Première Ministre et son Gouvernement ont annoncé, en octobre 2023, un plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus visant à déployer de nouvelles mesures pour garantir aux élus, premiers défenseurs de la République, des conditions d’exercice saines autour de 4 volets :

  • Un meilleur accompagnement des élus avec le renforcement de la protection fonctionnelle (rendre automatique son bénéfice, élargir le périmètre de la protection aux élus des communautés de communes) ; la mise en place d’un dispositif d’appui psychologique ; la prise en charge des frais de procédure et d’assurance (réduire le reste à charge à l’occasion de procédures judiciaires) ;
  • Une meilleure protection des élus avec la mise en place de mesures de sécurisation physique ; la mise en place de mesures de sécurisation ponctuelles des élus locaux avec une prise en charge d’une partie des dépenses exposées par les collectivités ou les élus ; le renforcement de la vidéosurveillance aux abords des sites menacés ;
  • Une meilleure sanction des agresseurs des élus avec un renforcement de ces sanctions, la création d’une circonstance aggravante en cas de harcèlement contre les élus locaux ; l’accélération des délais judiciaires en mettant en place des filières d’urgence dans les juridictions ; une meilleure information des élus sur le traitement judiciaire avec une information systématique des maires en cas de classement sans suite sur les motifs de classement ;
  • Une meilleure communication entre les élus et la justice avec l’élaboration d’un protocole entre les associations de maires et le Procureur de la République, la mise en place de formations croisées ; la facilitation de la communication du Procureur de la République envers les élus locaux avec la possibilité de prévoir un espace dédié à celui-ci dans les bulletins

En parallèle, les parlementaires ont engagé de nombreux travaux afin de qualifier et comprendre au mieux le phénomène

et y apporter des réponses efficaces et concrètes. Ainsi, au Sénat et à l’Assemblée de nombreuses initiatives ont vu le jour :

  • Le rapport d’information sur les menaces et les agressions auxquelles sont confrontés les maires, réalisé par le sénateur Philippe BAS en 2019 proposait 12 mesures pour la sécurité des maires et notamment l’élargissement de la protection fonctionnelle, le renforcement de l’assistance des services de l’Etat à l’égard des élus communaux, le renforcement de l’autorité du maire et l’effectivité de ses pouvoirs de polices ;
  • La proposition de loi déposée par Naïma MOUTCHOU et le Groupe Horizons et examinée dans le cadre de la niche parlementaire de mars 2022 qui prévoyait, entre autres, de systématiser l’information du maire des suites judiciaires données aux infractions causant un trouble à l’ordre public commises sur le territoire de sa commune, sans qu’il ait besoin d’en faire la demande au procureur de la République ;
  • La proposition de loi déposée par la sénatrice Nathalie DELATTRE, rapportée à l’Assemblée nationale par Marie-Agnès POUSSIER-WINSBACK et adoptée en 2022 visant à permettre aux assemblées d’élus et aux différentes associations d’élus de se constituer partie civile pour soutenir, au pénal les élus victimes ;
  • Le rapport d’information des députés JUMEL et SPILLEBOUT sur le statut de l’élu local publié en décembre 2023 qui mettait en avant l’urgence de la situation imposant de prioriser le rétablissement d’un exercice serein du mandat. Ce rapport recommandait également l’extension de la protection fonctionnelle, le renforcement de la connaissance des élus des services accompagnant les élus, l’amélioration de la réponse pénales contre les auteurs de violences ou de menaces faites aux élus et leurs proches mais également la nécessité, pour les décideurs locaux de pouvoir s’affranchir du risque pénal.

La proposition de loi : des mesures essentielles et consensuelles

La présente proposition de loi s’articule autour 6 axes reprenant essentiellement les différentes mesures proposées par les rapports parlementaires et le plan d’action du Gouvernement d’octobre 2023 :

  • Les auteurs de la proposition de loi ambitionnent de renforcer les peines encourues en cas de violences commises contre les élus en proposant, d’une part, un alignement des peines sur le régime existant pour certains dépositaires de l’autorité publique (article 1er) et, d’autre part, l’institution d’une peine de travail d’intérêt général en cas d’injure publique à l’encontre des élus locaux ou personnes dépositaires de l’autorité publique et d’une nouvelle circonstance aggravante en cas de harcèlement des élus locaux (article 2).
  • Plusieurs mesures visent à améliorer la protection fonctionnelle des élus (articles 3 à 8). Pour ce faire, il est proposé de rendre automatique l’octroi de cette protection, d’imposer la prise en charge par l’État des coûts de couverture assurantielle pour la protection fonctionnelle pour les communes de moins de 10 000 habitants et d’améliorer la prise en charge pour les élus victimes de l’ensemble des restes à charge et dépassements d’honoraires.
  • De la même manière, deux mécanismes destinés à protéger les candidats aux élections pour garantir l’engagement citoyen sont proposés (article 9) : l’élargissement du bénéfice de la protection fonctionnelle pendant la campagne électorale aux candidats (qui serait prise en charge par l’État) et la prise en charge par l’État des dépenses de sécurisation engagées par les candidats (vigiles, sécurité privée, caméras de surveillance, etc).
  • Les auteurs de la proposition de loi souhaitent améliorer l’accès aux assurances pour les locaux politiques et permanences parlementaires (article 10).
  • Afin de renforcer la prise en compte des réalités des mandats électifs locaux par les acteurs judiciaires et étatiques, il est proposé à titre principal de créer un mécanisme de dépaysement d’office des affaires lorsqu’un élu est mis en cause, tout en maintenant au sein de la juridiction les affaires dans lesquelles un élu est victime, pour éviter que l’élu ne se retrouve mis en cause et pris en charge comme victime par le même procureur (article 11).
  • À titre plus subsidiaire, les auteurs de la proposition de loi ambitionnent d’améliorer l’information des maires par les parquets quant aux suites données à leurs plaintes et signalements afin de faciliter leur compréhension des décisions judiciaires (article 12), mais également de permettre aux procureurs de s’exprimer dans les bulletins municipaux afin d’améliorer la lisibilité de leurs décisions qui intéressent la commune (article 13), et enfin de renforcer la présence des préfets et des procureurs au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) (article 14).

Au Sénat, la proposition de loi a été adoptée amendée à la marge et enrichie de deux nouveaux articles :

  • L’allongement des délais de prescription des délits d’injure et de diffamation publique commis à l’encontre des élus notamment (article 2 bis)
  • La création d’une circonstance aggravante en cas d’atteinte à la vie privée et familiale d’un candidat à un mandat électif public pendant la durée de la campagne électorales (article 2 ter)