Ce 11 novembre, jour de l’Armistice de la Première Guerre mondiale, la France tout entière s’est souvenue.

À l’Hôtel des Invalides, le Président de la République a inauguré une plaque en hommage aux « Malgré-nous », ces Alsaciens et Mosellans incorporés de force dans l’armée allemande durant la Seconde Guerre mondiale. Cet acte solennel marque une étape historique : celle de la reconnaissance nationale d’un drame longtemps resté douloureux et parfois incompris.

Une mémoire longtemps enfouie

Le 2 août 1940, l’Alsace et la Moselle cessent d’appartenir au territoire national. Sans annexion officielle, elles sont intégrées de fait au Reich et considérées comme des provinces allemandes. Dès lors, une politique de germanisation systématique est mise en œuvre : obligation d’adhérer à la Jeunesse hitlérienne pour les jeunes garçons et filles, instauration du Service national du travail (Reichsarbeitsdienst), encadrement idéologique et disparition progressive de toute expression française.

En août 1942, l’occupant franchit une nouvelle étape dans la contrainte : l’incorporation de force dans l’armée allemande.
C’est ainsi que 103 000 Alsaciens, 31 000 Mosellans et 21 000 femmes de nos trois départements furent contraints de porter l’uniforme allemand.

Ces hommes et ces femmes, victimes d’une tragédie imposée par l’histoire, seront appelés les « Malgré-nous ». Ils furent enrôlés contre leur gré dans la Wehrmacht ou la Waffen-SS. Beaucoup d’entre eux n’en sont jamais revenus.

Le devoir de mémoire et la reconnaissance nationale

Rappelons qu’à la Libération de 1945, alors que les anciens combattants alsaciens rentraient chez eux et que l’Alsace-Lorraine redevenait française, s’ajoutaient à leurs blessures et à leurs traumatismes la douleur et la frustration de ne pouvoir raconter publiquement leur expérience.

Longtemps, ils ont été victimes de l’ambivalence de leur situation : accueillis avec méfiance, parfois même rejetés, alors qu’ils avaient été les premières victimes d’une situation tragique imposée par la guerre et par l’histoire.

Le devoir de mémoire que nous, Alsaciens, portons est essentiel : nous sommes aujourd’hui Françaises et Français grâce à eux, ces hommes et ces femmes, ces soldats, et nous ne devons jamais oublier les sacrifices qu’ils ont consentis.

À travers cette cérémonie, la République reconnaît enfin la singularité du destin des Alsaciens et des Mosellans durant la Seconde Guerre mondiale.
Elle honore la souffrance de familles brisées, de mères ayant perdu leurs fils envoyé combattre sous un uniforme qu’il n’avait pas choisi, et de villages endeuillés où chaque nom gravé sur le monument rappelle cette tragédie.

En ce 11 novembre, jour où la France rend hommage à tous ses morts pour la Patrie, cette reconnaissance prend une portée symbolique majeure. Elle réunit dans un même hommage les combattants de la Grande Guerre, les résistants, les déportés et ces jeunes hommes et femmes contraints à servir sous l’ennemi.

L’Alsace et la Moselle au cœur de la mémoire nationale

Pour nous, Alsaciens et Mosellans, cet hommage national est un moment d’émotion et de fierté.
Il témoigne de l’attachement indéfectible de nos territoires à la France, malgré les épreuves et les déchirures du passé.
Le drame des « Malgré-nous » trouve enfin sa juste place dans la mémoire collective de la Nation.

En inaugurant cette plaque à l’Hôtel des Invalides, la France tourne une page douloureuse. C’est un geste d’unité, un geste de justice et de paix.