Voilà pourquoi, le groupe Horizons & apparentés a voté en faveur du présent projet de loi
Le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement a été déposé le 12 décembre 2023, en vue d’être examiné à l’Assemblée nationale en séance publique dans le cadre de la semaine du Gouvernement du 22 janvier 2024. Le projet de loi a été largement adopté le 16 janvier en commission des Affaires économiques.
L’examen en commission du texte a donné lieu à l’adoption de plusieurs amendements permettant de renforcer la portée du texte, notamment en matière de modernisation du fonctionnement des copropriétés et de meilleure circulation de l’information. Les outils de lutte contre les « marchands de sommeil sont également renforcés, avec des sanctions pénales plus importantes. Au plus près du terrain, les élus locaux et en particulier les Maires, voient leurs pouvoirs augmentés. C’est le cas par exemple pour mieux faire appliquer les démolitions de constructions irrégulières jugées dangereuses pour la sécurité et la santé des habitants.
L’examen en séance puis au Sénat a donné lieu à l’adoption de plusieurs mesures attendues pour renforcer encore l’implication et les pouvoir des élus locaux. Le projet de loi entérine ainsi la décentralisation au profit des communes et intercommunalités des pouvoirs de sanction et de recouvrement des amendes relatives au permis de louer. Les immeubles confisqués dans le cadre d’opérations de lutte contre l’habitat dégradé pourront être mis à disposition des communes.
Ce texte de protection des copropriétés les plus vulnérables et de leurs habitants constitue un levier nécessaire de notre politique du logement, et vient compléter l’action conduite par le Gouvernement et cette majorité, de soutien à la production de logements abordable, de lutte contre les phénomènes d’éviction des résidents permanents au profit des meublés de tourisme, de courte durée, ou encore d’accélération de l’adaptation du parc de logements aux transitions écologique et démographique, avec notamment 4,6 milliards d’euros investis pour 2024 dans MaPrimeRénov.
Petit retour en arrière
Le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement se nourrit de l’expérience tirée, à mi-parcours, du Plan Initiative copropriétés. Lancé en 2018 et piloté par l’agence nationale de l’habitat, ce plan accompagne la requalification de 88 000 logements situés dans des copropriétés en difficulté et engage près d’un milliard d’euros.
Ces montants significatifs répondent aux difficultés croissantes pour un nombre important de copropriétés, liées au vieillissement et à la dégradation rapide des grands ensembles, notamment dans les quartiers prioritaires de la ville, mais aussi dans des petites copropriétés situées dans les centres villes ou les faubourgs. Ces dégradations, parfois liées à une mauvaise gestion des copropriétés, peut susciter des problèmes de sécurité et de salubrité qui constituent un enjeu public.
Pour éviter de telles dégradations, les acteurs publics peuvent ainsi intervenir à différents stades : observatoire de l’état des copropriétés à l’aide d’un registre national, prévention des difficultés, redressement et requalification ou recyclage des copropriétés les plus dégradées. Le Plan Initiative copropriétés s’inscrit dans cette démarche.
Plusieurs freins et dysfonctionnements
Après 5 ans de mise en œuvre, plusieurs freins et dysfonctionnements des dispositifs existants ont été identifiés par les différents acteurs impliqués dans les programmes de redressement des copropriétés dégradées. L’enseignement principal reste de privilégier des interventions le plus en amont possible, pour éviter des dégradations irrémédiables, qui entraînent des conséquences socio- économiques plus importantes.
C’est l’objet du chapitre premier du présent projet de loi, qui permet notamment de souscrire un prêt collectif pour financer les travaux des copropriétés par un vote à la majorité, lors de l’assemblée générale. Cette mesure devrait faciliter en amont la réalisation des travaux nécessaires, dans un double objectif d’amélioration du cadre de vie et de transition écologique.
Le projet de loi prévoit également, au travers des articles du chapitre 2, des mesures visant à accélérer les procédures de recyclage et de transformation des copropriétés et les opérations d’aménagement stratégiques. Cela passe par exemple par la sécurisation juridique des expropriations, nécessaires pour assurer la sécurité des habitants et indispensables pour accélérer les opérations de recyclage urbain de grandes friches et permettre de répondre à la demande de production locale de logements, là où actuellement, les programmes de traitement des copropriétés dégradés et en difficulté s’étalent sur de nombreuses années (entre 5 à 10 ans pour les programmes de redressement, et 20 ans et plus pour les programmes impliquant la transformation de grandes copropriétés au sein d’un quartier).
La loi en résumé
- Améliorer l’information et le contrôle des copropriétaires, notamment sur le syndic ;
- Permettre de souscrire à des prêts collectifs facilités pour financer les travaux ;
- Couvrir avec un fonds de garantie les travaux de rénovation des copropriétés en difficulté :
- Renforcer l’arsenal juridique et pénal de lutte contre les « marchands de sommeil » ;
- Renforcer les outils à la main des collectivités et des opérateurs pour intervenir sur les copropriétés dégradées le plus en amont possible, afin d’éviter une dégradation définitive ;
- Décentralisation au profit des communes et EPCI des pouvoirs de sanction et de recouvrement des amendes relatives au permis de louer ;
- Mise à disposition gratuite d’immeubles confisqués par l’ARGASC à destination des
- communes ;
- Faciliter les travaux de rénovation énergétique des logements ;
- Garantir la bonne fin des opérations de requalification des copropriétés en difficulté le cas
- échéant, par voie d’expropriation ;
- Renforcer le pouvoir des communes en matière de régularisation des constructions irrégulièrement édifiées, et en particulier du maire pour procéder à la démolition de constructions irrégulières présentant des risques de sécurité et de santé ;
- Simplifier les procédures judiciaires et administratives afin de sécuriser les acteurs impliqués et, au global, réduire le délai de redressement ou de traitement des copropriétés dégradées ;
- Dispenser d’autorisation d’urbanisme pour les constructions d’hébergement d’urgence dont l’implantation ne dure pas plus de la durée de l’opération menée dans le cadre des opérations de lutte contre l’habitat indigne ;
- Facilitation des prises de possession de bâtis ou non bâtis dont l’acquisition est nécessaire à des opérations pour cause d’utilité publique ;
- Facilité de sortie des indivisions dans les Outre-mer ;
- Permettre la démolition des constructions sans droit ni titre dans un délai de 96h et non plus 24h dans les territoires de Mayotte et de Guyane ; et dispense de permis de construire pour certains logements dans ces mêmes territoires pour faire face au déficit de logements.
Chiffres clés et état actuel du droit
En 2022, la France compte 37,2 millions de logements, dont 82 % de résidences principales, 10 % de résidences secondaires et 8 % de logements vacants. La part des logements vacants dans le parc est en hausse depuis plus de 10 ans (passant de 6,4 % en 2005 à 7,5 % en 2012 puis 8,2 % en 2022). 55 % des logements sont des maisons, soit davantage que dans une majorité des pays d’Europe.
L’accroissement annuel du parc de logements est globalement en décélération depuis 2007. Les prix des logements ont été multipliés par 2,4 en 25 ans quand ceux des loyers ont été multipliés par 2,6 en 30 ans. Ainsi, le taux d’effort des ménages s’accentue fortement : la Fondation Abbé Pierre estimait en 2021 que 5,7 millions de personnes devaient fournir un effort financier excessif pour se loger, à plus de 35 % de leurs revenus.
Après avoir été dopé par un effet post-Covid, le nombre de ventes de logements anciens et neufs s’érode, avec une baisse de 12 % sur un an, soit 1,03 million de transactions entre janvier et mai 2023 contre 1,17 million de transactions sur la même période l’année précédente. Le total des prêts immobiliers accordés par les banques est en baisse de 45 % sur un an compte tenu du relèvement des taux d’intérêts face à l’inflation. Les réservations de logements neufs sont en baisse dans les mêmes proportions.
Pour autant, cet état de fait est à relativiser compte tenu du plateau haut atteint par le marché en 2019. Ainsi, le Ministère de l’Economie et des Finances indique que « l’immobilier est arrivé à un point de bascule, il a quitté une période exceptionnelle d’activité pour revenir à un niveau plus normal avec le retour de l’inflation ».
Une hausse des coûts de construction
A la hausse des taux d’emprunt évoquée, se conjugue une hausse des coûts de construction, en lien avec l’inflation et les tensions d’approvisionnement sur les matières premières, ou encore la nécessité d’adapter le parc aux exigences sociales et environnementales en matière de performance énergétique. Ces différents facteurs conduisent à un renchérissement des moyens devant être engagés par les investisseurs, particuliers comme professionnels, pour stimuler l’offre sur le marché du logement : renchérissement qui se répercute et alimente la hausse des loyers, laquelle est déjà en progression constante depuis près de 40 ans.
Structurellement, le marché du logement reste sensible en France compte tenu de la dynamique démographique du pays et de la faible production de logements. En résulte pour nos concitoyens des difficultés pour se loger à un coût abordable, dans un contexte où le pouvoir d’achat est impacté par l’inflation des produits de consommation.
Ces difficultés structurelles, au‑delà des conséquences sociales, ont également des conséquences sur l’emploi puisqu’un Français sur dix a déjà été contraint de refuser un emploi faute de logement, dont 14 % des moins de 35 ans.
Par ailleurs, le logement social est de plus en plus inaccessible : les demandeurs qui remplissent les critères d’accès se heurtent à des listes d’attente qui les obligent à patienter plusieurs années et le manque d’offres dans certaines régions aggrave cette difficulté. L’Union sociale pour l’habitat estime que le nombre de ménages en attente d’un logement social a atteint 2,42 millions fin 2022, alors que ce chiffre était de 1,8 million en 2015, sans compter les personnes pouvant renoncer à engager une demande de logement social compte tenu de la complexité de la procédure administrative.
La feuille de route du Gouvernement
Dans ce contexte, la feuille de route du Gouvernement en matière de logement, présentée le 16 novembre 2023 par la Première Ministre de l’époque, Elisabeth Borne, est structurée autour de 4 ambitions :
- Economique : logement abordable pour tous. Le Gouvernement soutien la production de logements abordables à hauteur de 50 % de la production totale en 110 000 logements sociaux seront produits en 2024. Le taux du livret A sera maintenu à 3 % et 8 milliards d’euros de prêts à taux bonifié de la Caisse des Dépôts seront déployés. L’offre de logements locatifs intermédiaires (LLI) sera doublée d’ici à 2026 pour la porter à 30 000 logements. Le prêt à taux zéro (PTZ) sera élargi afin de rendre 6 millions de Français de plus éligibles au dispositif, dans la perspective d’atteindre 40 000 PTZ en 2024. Le plan pour le logement des étudiants devra contribuer à la production de 35 000 logements en résidences universitaires sociales et intermédiaires d’ici 2027 ;
- Environnementale : chaque logement doit être conforme aux enjeux écologiques, pour répondre à l’urgence environnementale mais aussi pour protéger les Français face aux défis énergétiques et climatiques futurs. Le budget pour la rénovation énergétique du parc privé avec MaPrimeRénov’ sera de 4,6 milliards d’euros en Pour la rénovation du parc social, 1,2 milliard d’euros de subventions sont budgétés pour la période 2024-2026 avec un objectifde 120 000 logements réhabilités par an. Quant à l’adaptation du parc de logements au vieillissement, MaPrimeAdapt bénéficiera de 1,5 milliard d’euros pour 2024 ;
- Sociale : accès à un logement décent et adapté à chaque étape de la vie. Le Gouvernement poursuit la mise en œuvre des politiques sociales du logement et de l’hébergement, avec une capacité d’hébergement maintenue à un très haut niveau en 2024 (203 000 places). Le projet de loi inclura des mesures de lutte contre l’habitat indigne et pour la requalification des copropriétés dégradées ;
- Territoriale : des politiques du logement adaptées aux spécificités historiques, climatiques, géographiques, culturelles, démographiques de chaque territoire.
Les avantages de cette loi
Le présent projet de loi, en complément des mesures financières et réglementaires mises en place au cours des derniers mois, vise à accélérer et simplifier à la fois la lutte contre la dégradation de l’habitat et le développement d’opérations d’aménagement de grande ampleur.
Les difficultés croissantes pour un nombre important de copropriétés et les limites des outils existants pour gérer ces situations sont manifestes depuis le milieu des années 1990 : multiplication des situations d’urgence, dégradation rapide des grands ensembles, notamment dans les quartiers politique de la ville (QPV), ainsi que de petites copropriétés situées dans les centres villes ou les faubourgs.
Si la gestion quotidienne d’une copropriété relève de la sphère privée, les problèmes de sécurité et de salubrité qui découlent d’une dégradation avancée d’une copropriété en difficulté constituent un enjeu public. Pour éviter de telles dégradations, les acteurs publics peuvent ainsi intervenir à différents stades : observatoire de l’état des copropriétés à l’aide d’un registre national, prévention des difficultés, redressement et requalification ou recyclage des copropriétés les plus dégradées.
L’expérience montre la nécessité d’intervenir le plus en amont possible : plus l’intervention est tardive, plus les conséquences socio‑économiques sont importantes.
Le Plan Initiative
L’État et les collectivités, au travers de dispositifs opérationnels et financiers, ont pu prévenir des situations problématiques et accompagner les ménages dans l’amélioration de leur habitat, dans le double objectif d’amélioration du cadre de vie et de transition écologique. Piloté par l’agence nationale de l’habitat (Anah), le Plan Initiatives copropriétés, lancé en 2018, accompagne la requalification de 88 000 logements situés dans des copropriétés en difficulté. Ce plan arrive désormais à une étape charnière après 5 ans de mise en œuvre, qui ont permis l’engagement de plus de 960 millions d’euros.
Le bilan à mi‑parcours du Plan Initiative Copropriétés et la concertation avec les opérateurs en charge des programmes de redressement ont mis en exergue la nécessité d’améliorer les dispositifs existants, encore trop longs à produire leurs effets, et la nécessité de faciliter et d’accélérer leur mise en œuvre.
Le présent projet de loi vise en premier lieu à moderniser les outils à la main des collectivités et des opérateurs pour permettre une intervention le plus en amont possible tout en garantissant la bonne fin des opérations de requalification des copropriétés en difficulté le cas échéant, par voie d’expropriation.
Elle vise également une simplification des procédures judiciaires et administratives
Ces deux objectifs doivent permettre de réduire le délai de redressement ou de traitement des copropriétés dégradées.
En effet, actuellement, les programmes de traitement des copropriétés dégradées et en difficulté s’étalent sur plusieurs années – entre 5 à 10 ans pour les programmes de redressement (opération programmée de l’habitat, plan de sauvegarde…) ; 20 ans et plus pour les programmes impliquant la transformation de grandes copropriétés au sein d’un quartier.
Ces évolutions permettront d’agir, et notamment dans des territoires marqués par des déséquilibres des marchés locaux de l’habitat et une insuffisance de l’offre de logements abordables, afin de répondre au plus vite aux enjeux de production locale de logements, prioritairement par le recyclage urbain de grandes friches et emprises situées dans des secteurs déjà urbanisés. L’accélération de ces opérations, dont les délais de mise en œuvre dépassent régulièrement les 10 ans, présente un enjeu social majeur pour mieux répondre à la demande de logements.